mercredi 10 décembre 2008

A Jean Aubin, artiste total, notre ami.

Jean, tu viens de nous quitter, sans bruit.
Tu es parti « les pieds nus dans la rosée »
- c’est une de tes plus belles aquarelles, là, sous mes yeux -
Mais la rosée céleste cette fois !
Tu n’aurais pas dû.
Tu pouvais attendre
Encore un peu
On n’étaient pas encore prêts.
Ce n’est pas parce que tu avais 87 ans,
ça ne se voyait pas !
Et tu sais bien qu’une fois que tu avais dit que ça n’allait pas
-depuis que je te connaissais, depuis 26 ans, tu disais cela-
tu racontais tes projets
tu me montrais tes dernières idées de nouvelle technique
pour continuer le feu d’artifice qu’a été ta vie.
Tu te souviens tu as frôlé le mouvement perpétuel,
réinventé l’encre de chine, l’émail, le béton artistique
la cire de parquet pour faire « remonter » les couleurs…
et quoi encore ... Tant d’impertinence rieuse entre tes mains.
Et à la fois on avait l’impression qu’on ne savait rien
et qu’on était quelqu’un parce qu’on méritait tes explications
et que quand on te montrait quelque chose
qu’on avait fait
ça devenait beau.
- C’est beau ce que tu fais…
disais-tu toujours, l’air si convaincu,
et on te croyait.
On croyait à ce partage permanent,
au fil de ta vie,
avec tant de gens, des jeunes, des moins jeunes
et des chenus comme moi,
ce partage du beau et de la création
que tu avais mis ( trouvé ?) au cœur de toi.

Jean, j’ai eu la chance que tu m’accordes
ce splendide grand tableau sans titre,
aux bleus si profonds
et aux roses qui montent comme une aube
Ce n’est « rien » vraiment.
C’est peut-être Dieu qui rit parce qu’il vient de créer la nuit
et pense au jour …On a fait un « échange » avec un de mes collages
parce que tu ne le vendais pas
et que je n’avais pas les moyens de l’acheter bien sûr,
mais tu sais bien que c’était en fait un cadeau. Un cadeau merveilleux, dont je ne reviens toujours pas,
et qui restera là au milieu de nous, comme un signe de l’invisible que tu mettais en tout. Et qui me guide quand je triture et colle mes lambeaux
de vieilles affiches
pour y débusquer aussi de l’invisible et le partager peut-être
et la luxuriance de ce qui est et qu’on ne voit pas de suite
et qu’on peut dire un peu.

Jean tu n’aurais pas dû partir si tôt,
tant de richesse en toi encore.
Et puis tu n’avais pas attaqué
« les pelleteuses »
tu sais, tu le concoctais depuis un bon moment,
tu en riais déjà…
Le titre que tu leur aurais donné
nous manquera toujours Jean,
c’était tout toi.

Adieu Jean. Les larmes me viennent et pourtant je souris aussi. C’est tout toi.

André Ernst.

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